Publié le 17 juillet 2025 – Par la rédaction d’Analysons Kongo
Un accord historique… mais deux rythmes d’application
Le 27 juin 2025, sous la médiation des États-Unis et du Qatar, la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda ont signé à Washington un accord de paix bilatéral pour mettre fin à des décennies de tensions et de conflits, notamment à l’Est de la RDC.
Mais alors que Kigali a déjà ratifié l’accord dans un temps record via son Parlement, Kinshasa reste silencieuse.
Côté Rwanda : Rapidité, discipline et anticipation juridique
À peine deux semaines après la signature de l’accord, le Conseil des ministres rwandais, présidé par Paul Kagame, a adopté un projet de loi de ratification. Ce texte a été approuvé à l’unanimité par le Parlement rwandais.
En vertu de l’article 190 de la Constitution rwandaise,
« Les traités et accords internationaux régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication au journal officiel, une autorité supérieure aux lois ordinaires. »
Conséquences immédiates :
- Obligation de retrait des troupes en RDC sous 90 jours ;
- Interdiction de soutenir militairement ou financièrement les groupes armés (M23, FDLR, etc.) ;
- Mise en place d’un mécanisme régional de sécurité ;
- Respect strict de l’intégrité territoriale de la RDC ;
- Début de négociations économiques régionales, avec l’appui des États-Unis.
Côté RDC : Silence parlementaire et flou stratégique
Contrairement au Rwanda, la RDC n’a toujours pas entamé le processus de ratification parlementaire. Le texte signé à Washington n’a pas été inscrit à l’ordre du jour du Parlement ni publié officiellement. Cela crée une zone d’ambiguïté juridique, voire une vulnérabilité diplomatique.
Conséquences de cette non-ratification :
- Le texte n’a aucune force contraignante en droit congolais ;
- La RDC n’est pas juridiquement protégée en cas de violation de l’accord ;
- Elle peut être accusée de manque de sérieux diplomatique sur la scène internationale ;
- Cela donne au Rwanda une longueur d’avance juridique et stratégique.
Une même signature, deux effets diamétralement opposés
Aspect | Rwanda | RDC |
---|---|---|
Ratification | ![]() | ![]() |
Force légale interne | Supérieure aux lois nationales | Aucune valeur légale |
Engagement militaire | Retrait en 90 jours | Pas d’engagement fixé |
Position diplomatique | Proactive, crédible | Passive, ambigüe |
Couverture médiatique | Structurée, transparente | Floue, sans communication officielle |
Analyse stratégique : Kigali anticipe, Kinshasa hésite
Le Rwanda montre une habileté diplomatique indéniable. En ratifiant rapidement l’accord, il se place en position de force morale et juridique, anticipant toute future accusation ou manquement.
La RDC, en revanche, risque de perdre l’initiative et de fragiliser sa souveraineté législative, en donnant l’impression qu’elle ne croit pas elle-même à ce qu’elle signe à l’international.
Conclusion
L’accord de Washington pouvait ouvrir une nouvelle ère de paix et de coopération entre les deux pays. Mais la différence de traitement entre Kigali et Kinshasa montre à quel point les cultures diplomatiques et institutionnelles divergent encore entre les deux capitales.
La RDC doit agir. Pour que la paix ne soit pas un simple acte symbolique, le Parlement congolais doit impérativement ratifier l’accord, afin de ne pas se retrouver lié par des engagements unilatéraux sans bénéficier des protections prévues.
À suivre sur AnalysonsKongo.com :
Notre prochain dossier portera sur les enjeux sécuritaires dans le Nord-Kivu après Washington 2025, avec une carte interactive des zones à désengager selon les termes de l’accord.